Sous les flocons, les cornus

En ce 19 octobre, le jour n’est pas encore levé lorsque je sors du refuge où j’ai dormi.

Parti la veille quelques centaines de mètres plus bas, une pluie fine m’accompagnait durant toute la montée. Soleil d’automne, les mélèzes coloraient la montagne. Au bord du chemin caillouteux, un contrôle de routine par le Troglodyte mignon. Evoluant dans sa canopée de ronces et de vernes, sa joie de vivre hyperactive est à toute épreuve.

Je me remettais alors en route pour gagner le refuge. De là, je partirai au petit matin pour rejoindre le territoire des bouquetins.

Pas de neige, le sol est gelé, la végétation cristallisée. Quelques nuages, le ciel est dégagé. Quelques bouffées de brouillard montent du vallon. Dans la forêt sombre du versant opposé, le cerf se fait encore entendre timidement. La page du brame est ici bel et bien tournée. Sur cette petite crête, les bouquetins sont là. Peu farouches, flegmatiques, c’est toujours un plaisir de les observer et de passer un moment chez eux. Le soleil apparaît ; les couleurs des pentes gazonnées palpitent sous leur gaine de glace. Tout le monde profite de cette chaude lumière. L’automne va l’emporter sur l’hiver.

Sur la pente ensoleillée, le Casseur d’os fait un passage. Il m’offre un magnifique spectacle en passant juste au-dessus de moi. Milieu de matinée, le brouillard du versant nord s’attaque à la ligne de crête. En face, plus haut, les pentes enneigées sont également envahies. Le temps change à une vitesse phénoménale. C’est de coutume ici. Les mâles cornus se regroupent sur la pente gazonnée.

Bientôt, la visibilité devient presque nulle. Un gros bouquetin s’avance sur le bord des rochers. Toujours aussi flegmatique, il semble écouter la montagne.